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Apologie du nazisme et propos antisémites, des fautes graves sanctionnées par l’Education Nationale…

Droit administratif | Apologie du nazisme | Droit de l’Education | Discipline | Disproportion de la sanction par rapport à la faute (Non) | Elève | Exclusion définitive | Erreur manifeste d'appréciation (Non) | Faute | Insuffisance de motivation de la décision de sanction (Non) | Méconnaissance de la règle "non bis in idem" (Non) | Mesure conservatoire | Photomontages | Propos antisémites | Réseau social Snapchat | Sanction | Suspension


Cour administrative d’appel de BORDEAUX, 23 février 2023, Ministre de l’Education Nationale c/ M. et Mme C. et leur fils, Req. n° 21BX00896



En premier lieu, sur le bien-fondé du jugement attaqué, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 2° Infligent une sanction ; (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire". Et aux termes de l'article L. 211-5 de ce code : "La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision".


En l’espèce, la décision attaquée vise les articles applicables du code de l'éducation ainsi que ceux du règlement intérieur du lycée professionnel Flora Tristan. Elle rappelle le motif de la sanction infligée par le conseil de discipline de cet établissement et fait état de l'implication personnelle de l'intéressé dans l'échange sur un réseau social de photographies et de photomontages exposant des élèves et des professeurs en utilisant les images d'Hitler, de la croix gammée et du salut hitlérien en violation du règlement intérieur de l'établissement et qualifiées comme présentant un caractère outrageant, à l'égard de membres de la communauté éducative. Elle comporte ainsi, de manière suffisamment précise, l'énoncé des considérations de droit et de fait en constituant son fondement pour permettre à l'intéressé de comprendre et de contester utilement la sanction prononcée. La circonstance, à la supposer établie, que cette motivation serait identique à celles des sanctions prononcées à l'encontre d'autres élèves ayant commis les mêmes faits n'est pas de nature à caractériser l'insuffisance de la motivation de la décision concernant l'élève sanctionné. Dès lors, le Ministre de l'Education Nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé cette décision au motif qu'elle était insuffisamment motivée.


En deuxième lieu, sur le fond du litige en ce qui concerne la légalité de la décision de sanction du 28 janvier 2019 :


Tout d’abord, aux termes de l'article D. 511-33 du code de l'éducation : "En cas de nécessité, le chef d'établissement peut, à titre conservatoire, interdire l'accès de l'établissement à un élève en attendant la comparution de celui-ci devant le conseil de discipline. S'il est mineur, l'élève est remis à son représentant légal. Cette mesure ne présente pas le caractère de sanction".


En l’espèce, il ressort des termes de la décision du 26 novembre 2018, que le chef d'établissement a, sur le fondement de l'article D. 511-33 du code de l'éducation, interdit à titre conservatoire au jeune élève sanctionné, inscrit en internat, l'accès à l'établissement jusqu'à la réunion du conseil de discipline.


D'une part, les circonstances que l'établissement aurait refusé de transmettre les cours durant la période de mise en œuvre de la mesure conservatoire et que le chef d'établissement aurait pris attache avec un autre établissement pour trouver une place au jeune élève sanctionné afin d'assurer la continuité de sa scolarisation ne sauraient suffire à elles seules à établir que la décision d'exclusion définitive aurait été prise avant la tenue du conseil de discipline ainsi que le soutiennent les requérants. Par ailleurs, à la supposer même établie, l'irrégularité de la notification de la mesure conservatoire est sans incidence sur la légalité de la décision de sanction du 28 janvier 2019.


D'autre part, cette interdiction d'accès d'une durée de seize jours [prise par décision du 26 novembre 2018] qui ne constitue que la mesure conservatoire prévue par les dispositions précitées du code de l'éducation ne présente pas le caractère d'une sanction. Les requérants ne sauraient utilement se prévaloir à cet égard du livret conseils sur la procédure disciplinaire élaboré par le Rectorat de DIJON qui n'a pas de valeur règlementaire. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la décision contestée sanctionnerait l'intéressé une deuxième fois pour les mêmes faits en méconnaissance du principe "non bis in idem" ou qu'elle constituerait une sanction déguisée.


Ensuite, aux termes de l'article R. 511-13 du même code : "I.- Dans les collèges et lycées relevant du ministre chargé de l'éducation, les sanctions qui peuvent être prononcées à l'encontre des élèves sont les suivantes : 1° L'avertissement ; 2° Le blâme ; 3° La mesure de responsabilisation ; 4° L'exclusion temporaire de la classe. Pendant l'accomplissement de la sanction, l'élève est accueilli dans l'établissement. La durée de cette exclusion ne peut excéder huit jours ; 5° L'exclusion temporaire de l'établissement ou de l'un de ses services annexes. La durée de cette exclusion ne peut excéder huit jours ; 6° L'exclusion définitive de l'établissement ou de l'un de ses services annexes. / Les sanctions prévues aux 3° à 6° peuvent être assorties du sursis à leur exécution dont les modalités sont définies à l'article R. 511-13-1. / (...) / III.- En cas de prononcé d'une sanction prévue au 4° ou au 5° du I, le chef d'établissement ou le conseil de discipline peut proposer une mesure alternative consistant en une mesure de responsabilisation. / (...)". Aux termes de des articles 3.1.2 du règlement intérieur du Lycée professionnel Flora Tristan : "(...) L'enregistrement de l'image ou de la voix d'une personne est interdit dans l'enceinte de l'établissement, excepté sous la responsabilité d'un adulte et /ou à des fins pédagogiques. En cas d'infraction, l'appareil sera confisqué temporairement et l'élève encourra une sanction. Ne sont pas tolérés sous peine de sanction : les manifestations bruyantes, les attitudes provocatrices, les brimades, les fraudes et les falsifications, la violence verbale (...)". Aux termes de son article 14 : "(...) Une procédure disciplinaire est obligatoirement engagée par le chef d'établissement en cas d'acte grave envers un membre du personnel ou un autre élève, de violences verbales ou de violence physique à l'égard d'un membre du personnel (...) ". Aux termes de son article III-2-6 : "Les élèves doivent respecter tous les membres de la communauté éducative".


En l’espèce, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que l'élève sanctionné est l'auteur de deux photomontages, le premier représentant un chat affublé d'une croix gammée et d'une petite moustache évoquant Adolf Hitler, la seconde, non produite par les requérants, présentant la tête d'un élève de sa classe au centre d'une assiette de frites, portant la légende "on mange le führer". Ces photomontages ont été diffusés sur le réseau social Snapchat, au sein d'un groupe privé réunissant 15 des 16 élèves de la classe, le seul élève non inclus dans le groupe étant de confession juive. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ressort du compte rendu de la commission académique d'appel qui s'est réunie le 18 janvier 2019, que seules les photographies publiées par chacun des élèves ont été prises en compte et que s'agissant du jeune élève sanctionné c'est la photographie avec le chat qui a été perçue par les enseignants et le professeur principal de la classe, comme diffamatoire en raison du jeu de mots avec le nom de ce dernier. La circonstance que l'un des deux photomontages aurait été publié par l'intéressé en réaction à la publication d'une photographie dans laquelle il apparait lui-même grimé avec une moustache rappelant celle d'Adolf Hitler ne saurait ôter aux faits leur caractère de gravité alors en outre qu'il ressort de ce compte rendu que les élèves de cette classe ont fait l'objet d'une mise en garde l'année précédente à la suite de propos antisémites tenus à l'encontre de l'un de leur camarade de confession juive. Dans ces conditions, eu égard à la gravité des faits commis par le jeune élève sanctionné en méconnaissance des dispositions précitées du règlement intérieur, le Recteur de l'Académie de BORDEAUX, en prononçant à l'encontre de l’élève fautif la sanction d'exclusion définitive sans sursis, n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni méconnu les principes d'individualisation et de proportionnalité des sanctions.


Il résulte de tout ce qui précède que le Ministre de l'Education Nationale est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 28 janvier 2019 du Recteur de l'Académie de BORDEAUX.


Commentaire : Le professeur ne peut pas tout faire dans l’éducation d’un enfant, il appartient aux parents de mettre en garde leurs enfants de ne pas se laisser embrigader sur les réseaux sociaux et encore moins lorsque les messages sont nauséabonds, offensants et attentatoires à la dignité humaine et au devoir de mémoire.



Avocat Droit Administratif | Avocat Droit de l’Education

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