Fonction publique | Accident de service | Comportement ou propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique (Non) | Evénement soudain et violent | Maladie professionnelle
Conseil d’Etat, 15 mai 2023, Commune de CHECY c/ Mme B., Req. n° 455610
Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : "Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...). / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...)".
Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien entre un agent et son supérieur hiérarchique ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent.
En l’espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’une fonctionnaire, adjointe technique de 2ème classe employée par la commune de CHECY au sein du service de restauration scolaire, a demandé au maire de CHECY la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 26 septembre 2016. Par un arrêté du 23 octobre 2017, le maire, après deux avis de la commission de réforme en date des 6 avril et 20 septembre 2017, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident. Par un jugement du 6 août 2019, le tribunal administratif d'ORLEANS a rejeté les demandes de cette fonctionnaire tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 octobre 2017, à ce qu'il soit enjoint au maire de prendre une nouvelle décision, à la condamnation de la commune de CHECY à lui verser la somme de 50000 € en réparation de son préjudice moral en raison de faits de harcèlement moral dont elle aurait été victime et, à titre subsidiaire, à ce qu'une expertise médicale soit ordonnée. Sur appel de ladite fonctionnaire, la cour administrative d'appel de NANTES, par un arrêt du 15 juin 2021, a annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 octobre 2017 en ce que cet arrêté n'a pas reconnu l'imputabilité au service de la pathologie de la fonctionnaire concernée, annulé l'arrêté litigieux, enjoint au maire de CHECY de prendre une nouvelle décision concernant l'imputabilité au service de la pathologie dans un délai d'un mois et rejeté le surplus des conclusions de ladite fonctionnaire et les conclusions de la commune de CHECY. La commune de CHECY s’est pourvue en cassation contre cet arrêt. Eu égard aux moyens qu'il a soulevé, le pourvoi a été regardé comme dirigé contre l'arrêt en tant seulement qu'il a fait droit aux conclusions de la fonctionnaire... à fin d'annulation de l'arrêté du 23 octobre 2017 et aux conclusions à fin d'injonction liées à celles-ci.
Le Conseil d’Etat a jugé qu’il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour annuler le jugement attaqué, la cour a estimé que la demande présentée par ladite fonctionnaire devant le tribunal administratif d'ORLEANS tendait en réalité à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa pathologie ayant justifié l'octroi d'un arrêt de travail à compter du 26 septembre 2016 et en a conclu que c'était à tort que le tribunal avait estimé que l'autorité administrative n'avait pas commis d'erreur d'appréciation en refusant de reconnaître imputable au service la pathologie de ladite fonctionnaire à l'origine de cet arrêt de travail. Il ressort toutefois des pièces du dossier soumis aux juges du fond, en particulier du formulaire de déclaration établi par ladite fonctionnaire le 10 octobre 2016, que la demande transmise à la commune de CHECY, sur laquelle la commission de réforme a émis à deux reprises un avis défavorable en date des 6 avril et 20 septembre 2017, et qui a conduit le maire de CHECY à prendre l'arrêté litigieux, portait exclusivement sur la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident survenu le 26 septembre 2016 à la suite d'un entretien entre la fonctionnaire et son supérieur hiérarchique, dont il n'est pas établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. La circonstance que la commission de réforme ait également émis, dans son avis du 20 septembre 2017, un avis défavorable à la reconnaissance d'une maladie professionnelle et que l'arrêté litigieux ait reproduit cette mention est à cet égard indifférente. Il s'ensuit qu'en statuant sur la question de la reconnaissance de l'imputabilité au service d'une pathologie, et non sur la question de la reconnaissance de l'imputabilité au service de l'accident survenu le 26 septembre 2016 dont elle était saisie, la cour administrative d'appel a méconnu les termes du litige.
Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, que la commune de CHECY est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque en tant qu'il a fait droit aux conclusions de la fonctionnaire à fin d'annulation de l'arrêté du 23 octobre 2017 et aux conclusions à fin d'injonction liées à celles-ci.
Avocat Fonction Publique | Avocat Droit Administratif
Comments