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Sur les conséquences de la fin de détachement sur emploi fonctionnel...

Dernière mise à jour : 3 mars 2023

Fonction publique | Âge légal de départ à la retraite | Congé spécial | Conséquences de la fin de détachement | Emplois de direction de la fonction publique territoriale | Fin de détachement sur emploi fonctionnel | Indemnité de licenciement | Poste vacant | Procédure de fin de détachement sur emploi fonctionnel | Prise en charge | Reclassement | Retraite | Surnombre | Pension de retraite à taux plein


Conseil d'Etat, 10 février 2023 Communauté d'agglomération GRAND PARIS SUD SEINE-ESSONNE-SENART c/ Centre interdépartemental de gestion de la grande couronne de la Région ILE-DE-FRANCE (CIG), Req. n° 443616



En fait, par un arrêté du maire de COLOMBES du 26 décembre 2006, un fonctionnaire, directeur territorial en fonction au sein des services de cette commune, a été détaché pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2007 auprès de la communauté d'agglomération SEINE-ESSONNE, le président de cet établissement ayant, par un arrêté du 19 décembre 2006, procédé au détachement de l'intéressé sur l'emploi fonctionnel de directeur général adjoint des services. Le président de cet établissement public a par un même arrêté du 9 novembre 2007, décidé de mettre fin au détachement dudit fonctionnaire sur son emploi fonctionnel à compter du 5 janvier 2008, et dit que l'agent serait réintégré à cette date dans sa collectivité d'origine. Après s'être vu refuser sa réintégration dans sa collectivité d'origine par un courrier du 26 novembre 2007, le fonctionnaire concerné a sollicité, par un courrier du 29 novembre 2007, son reclassement dans les effectifs de la communauté d'agglomération sur le fondement des articles 53 et 97 de la loi du 26 janvier 1984, demande rejetée par une décision du président de la communauté d'agglomération SEINE-ESSONNE en date du 13 décembre 2007, confirmée les 2 et 29 janvier 2008. Il a alors été pris en charge par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) à compter du 1er avril 2008 puis par le centre interdépartemental de gestion (CIG) de la grande couronne de la région ILE-DE-FRANCE à compter du 1er janvier 2010. Par un courrier du 13 septembre 2011 reçu le 19 septembre, ledit fonctionnaire a adressé à la communauté d'agglomération une demande tendant à bénéficier du congé spécial prévu par l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. Cette demande a été implicitement rejetée par une décision en date du 19 décembre 2011. Ayant continué à assurer la prise en charge de la rémunération de dudit fonctionnaire, le CIG a demandé à la communauté d'agglomération SEINE-ESSONNE, devenue GRAND PARIS SUD SEINE-ESSONNE-SENART, le remboursement des sommes versées à compter du 1er janvier 2012. Cette demande a été rejetée par le président de la communauté d'agglomération le 3 janvier 2013. Le CIG a alors demandé au tribunal administratif de VERSAILLES d'annuler la décision du 3 janvier 2013 par laquelle la communauté d'agglomération a refusé de lui rembourser les rémunérations qu'il a versées au fonctionnaire concerné au titre de sa prise en charge depuis le 1er janvier 2012 et de la condamner à lui verser la somme de 262246,43 € tous chefs de préjudices confondus, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation. Par un jugement du 12 juin 2017, dont le CIG a relevé appel, le tribunal administratif de VERSAILLES a rejeté sa demande. Par un arrêt du 2 juillet 2020, la cour administrative d'appel de VERSAILLES a annulé le jugement du tribunal administratif et condamné la communauté d'agglomération à verser au CIG la somme de 254746,43 € assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 novembre 2012. La communauté d'agglomération se pourvoit en cassation contre cet arrêt.


En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : "A l'expiration d'un détachement de longue durée, le fonctionnaire est, sauf intégration dans le cadre d'emplois ou corps de détachement, réintégré dans son corps ou cadre d'emplois et réaffecté à la première vacance ou création d'emploi dans un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d'origine. / Lorsqu'aucun emploi n'est vacant, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an dans sa collectivité d'origine dans les conditions prévues à l'article 97. Si, au terme de ce délai, il ne peut être réintégré et reclassé dans un emploi correspondant à son grade, le fonctionnaire est pris en charge dans les conditions prévues à l'article 97 soit par le Centre national de la fonction publique territoriale pour les fonctionnaires relevant de l'un des cadres d'emplois de catégorie A auxquels renvoie l'article 45, soit par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l'établissement qui les employait antérieurement à leur détachement pour les autres fonctionnaires. (…)".


D'autre part, aux termes de l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : "Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas ci-dessous et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l'article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98. Ces dispositions s'appliquent aux emplois : (…) de directeur général, de directeur général adjoint des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre de plus de 10 000 habitants, (…)". En vertu du I de l'article 97 de la même loi, si la collectivité ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade dans son cadre d'emplois ou, avec son accord, dans un autre cadre d'emplois, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Au terme de ce délai, le fonctionnaire est pris en charge par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité. Le fonctionnaire déchargé de ses fonctions en application de l'article 53 peut demander à être pris en charge avant le terme de ce délai ; il est alors fait droit à sa demande le premier jour du troisième mois suivant sa demande. En vertu du II du même article, la prise en charge cesse après trois refus d'offre d'emploi. Lorsque le fonctionnaire pris en charge remplit les conditions lui permettant de bénéficier d'une pension de retraite de base à taux plein, il est radié des cadres d'office et admis à faire valoir ses droits à la retraite. Aux termes de l'article 99 de la même loi : "Les collectivités ou établissements dans lesquels des fonctionnaires territoriaux occupent un emploi fonctionnel visé à l'article 53 ont la faculté d'accorder, sur demande des intéressés, un congé spécial d'une durée maximale de cinq ans dans des conditions fixées par décret. / La demande de congé spécial au titre du premier alinéa de l'article 53 peut être présentée jusqu'au terme de la période de prise en charge prévue au I de l'article 97. Le congé spécial de droit est accordé par la collectivité ou l'établissement public dans lequel le fonctionnaire occupait l'emploi fonctionnel, y compris lorsque la demande est présentée pendant la période de prise en charge. / Pendant ce congé, la rémunération des intéressés demeure à la charge de la collectivité ou de l'établissement public concerné. / A l'expiration de ce congé, le fonctionnaire est admis d'office à la retraite. / Toutefois, les fonctionnaires qui bénéficient d'un congé spécial de droit octroyé pendant la prise en charge sont mis à la retraite au plus tard à la fin du mois au cours duquel ils réunissent les conditions requises pour obtenir une pension à jouissance immédiate à taux plein. Un décret en conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article".


Aux termes de l'article 6 du décret n° 88-614 du 6 mai 1988 pris pour l'application des articles 98 et 99 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée et relatif à la perte d'emploi et au congé spécial de certains fonctionnaires territoriaux : "Le congé spécial prévu à l'article 99 de la loi du 26 janvier 1984 () peut être accordé si le fonctionnaire qui en fait la demande compte au moins vingt ans de services civils et militaires valables pour le calcul de ses droits à pension, est à moins de cinq ans de son âge d'ouverture du droit à une pension de retraite et occupe son emploi depuis deux ans au moins. / Ce congé est accordé de droit dans les mêmes conditions au fonctionnaire qui en fait la demande en application de l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée sans toutefois que puisse lui être opposée la condition d'une occupation de son emploi depuis deux ans au moins. (…)". Enfin aux termes de l'article 7 de ce décret : "Le congé spécial est accordé par l'autorité territoriale qui a nommé le fonctionnaire dans l'emploi fonctionnel".


Il résulte des dispositions citées que lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire territorial sur un emploi fonctionnel mentionné à l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, à l'initiative de la collectivité ou de l'établissement au sein de laquelle ou duquel il est détaché sur un tel emploi, que cette fin de fonctions intervienne avant le terme normal du détachement ou résulte du non-renouvellement de celui-ci, ce fonctionnaire est en principe réintégré dans son corps ou cadre d'emplois et réaffecté à la première vacance ou création d'emploi dans un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d'origine en application de l'article 67 de la même loi. Si sa collectivité ou son établissement d'origine n'est pas en mesure, à la date à laquelle la fin du détachement prend effet, de le réaffecter sur un tel emploi, le fonctionnaire est en droit, dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi 84-53 du 26 janvier 1984, de demander à la collectivité ou à l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel de bénéficier d'un reclassement, d'un congé spécial ou d'une indemnité de licenciement. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'article 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 n'est plus applicable à la situation du fonctionnaire territorial qui demande le bénéfice de l'une des facultés qui lui sont offertes par les dispositions de l'article 53 de la même loi.


En l’espèce, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d'une part, que la commune de COLOMBES avait indiqué, à la date de la fin anticipée du détachement du fonctionnaire concernée en novembre 2007, qu'elle n'était pas en mesure de le réintégrer dans ses effectifs et, d'autre part, que ce dernier, après que le président de la communauté d'agglomération a refusé d'accéder à sa demande tendant à son reclassement dans les effectifs de la communauté d'agglomération, a formulé sa demande de congé spécial, en vertu de l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, auprès de la collectivité dans laquelle il a effectué son détachement, le 13 septembre 2011, soit pendant la période au titre de laquelle il était pris en charge en vertu de l'article 97 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984. Il suit de là que la communauté d'agglomération était tenue de lui accorder le bénéfice du congé spécial, dont il remplissait les conditions, sans qu'il soit besoin de vérifier si la commune de COLOMBES était en mesure de le réintégrer dans ses effectifs au moment où il a formulé cette demande de congé spécial. Ce motif, qui répond au moyen invoqué devant la cour et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif retenu par l'arrêt attaqué, dont il justifie légalement le dispositif.


En second lieu, en revanche, aux termes de l'article L. 161-17-2 du code de la sécurité sociale : "L'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite mentionné au premier alinéa de l'article L. 351-1 du présent code, à l'article L. 732-18 du code rural et de la pêche maritime, au 1° du I de l'article L. 24 et au 1° de l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite est fixé à soixante-deux ans pour les assurés nés à compter du 1er janvier 1955. / Cet âge est fixé par décret dans la limite de l'âge mentionné au premier alinéa pour les assurés nés avant le 1er janvier 1955 et, pour ceux nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1954, de manière croissante : 1° A raison de quatre mois par génération pour les assurés nés entre le 1er juillet 1951 et le 31 décembre 1951 ; 2° A raison de cinq mois par génération pour les assurés nés entre le 1er janvier 1952 et le 31 décembre 1954". Par ailleurs, les personnes morales de droit public ne peuvent être condamnées à payer une somme qu'elles ne doivent pas, cette interdiction étant d'ordre public et devant être soulevée d'office par la juridiction à laquelle une telle condamnation est demandée.


En l’espèce, en jugeant, pour calculer le montant de l'indemnisation à verser au CIG, que l'intéressé, né en 1952, avait atteint l'âge légal du départ en retraite au 31 décembre 2016, alors que le relevé de pensions de la CNRACL indiquait qu'il avait totalisé, au mois de mai 2015, les 164 trimestres nécessaires pour l'obtention d'une pension immédiate de retraite à taux plein, la cour administrative d'appel de VERSAILLES a dénaturé les pièces du dossier qui lui étaient soumis et méconnu le principe énoncé au point précédent.


Dès lors, la communauté d'agglomération GRAND PARIS SUD SEINE-ESSONNE-SENART est fondée à demander, dans cette mesure, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.


Sur le règlement de l’affaire au fond, aux termes de l'article 6 du décret n° 88-614 du 6 mai 1988, relatif au congé spécial de certains fonctionnaires territoriaux : "(…) Sous réserve des dispositions de l'avant-dernier alinéa de l'article 99 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée, il [le congé spécial] prend fin lorsque le fonctionnaire atteint la limite d'âge et, au plus tard, à la fin de la cinquième année après la date où il a été accordé. (…) ". Selon les dispositions du I de l'article 8 de ce même décret : "L'intéressé perçoit, pendant le congé spécial, une rémunération égale au montant du traitement indiciaire atteint à la date de la mise en congé, majoré du montant de l'indemnité de résidence et, s'il y a lieu, du supplément familial de traitement".


En l’espèce, le congé spécial que la communauté d'agglomération GRAND PARIS SUD SEINE-ESSONNE-SENART devait accorder au fonctionnaire concerné aurait dû débuter le 1er décembre 2011, comme l'intéressé le demandait, pour s'achever au mois de mai 2015, date à laquelle il avait, d'une part, atteint l'âge légal de départ en retraite et, d'autre part, cumulé 164 trimestres de cotisations, tous régimes confondus. Il s'ensuit que le CIG est fondé à demander la condamnation de la communauté d'agglomération GRAND PARIS SUD SEINE-ESSONNE-SENART à lui verser la somme de 172853 € correspondant aux dépenses qu'il a engagées au titre de la prise en charge dudit fonctionnaire, pendant la période du 1er décembre 2011 au 31 mai 2015, au cours de laquelle cet agent pouvait prétendre au bénéfice du congé spécial.


La somme de 172853 € attribuée au CIG portera intérêts à compter du 13 novembre 2012, date de sa demande préalable. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts au 13 novembre 2013 et à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.


[Annulation et règlement au fond]



Avocat Fonction Publique | Avocat Droit Administratif

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